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Que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite

vendredi 12 janvier 2007, par gerald cusin


Les nouvelles règles fiscales espagnoles en matière de financement des associations par les contribuables ne satisfont pas l’Église catholique qui jusqu’à ces derniers temps occupait une situation de monopole confortée par Franco, au nom du soutien sans faille que celle-ci a apporté au dictateur dans l’écrasement de la République.

Jusqu’à il y a peu, l’Etat finançait l’Église espagnole directement (ce qui lui permettait de vivre très largement sans toucher à ses richesses propres qui sont colossales). Maintenant, le contribuable lui-même peut choisir de faire verser un certain pourcentage de son impôt soit à une ONG, soit à l’Église catholique. On pourrait certes, vu d’ici, trouver à redire à cette forme de financement public, mais chacun sait que « vérité en de ça des Pyrénées, erreur au delà » Rassurez-vous cependant, l’Etat continue de financer l’enseignement obligatoire du catéchisme dans les écoles (on n’est pas obligé d’y aller, mais l’Etat doit obligatoirement assurer ces cours. »

Malheureusement, si j’ose dire, pour les prélats, l’enthousiasme des Espagnols pour le clergé n’est pas à la mesure de leurs espérances (d’ailleurs y a-t-il en Europe un pays à la fois aussi religieux et aussi anticlérical ?). Les rentrées financières ont subi une forte baisse. L’Église pleure misère.

C’est sans doute ce qui a conduit certains evêques, comme celui de Castellon à l’est du pays, Juan Antonio Reg, à regarder avec les yeux de Chimène ce veau d’or des temps modernes, j’ai nommé la Bourse qu’il est venu adorer dans son temple.

N’y allant pas de main morte, (dieu, c’est bien connu, vomit les tièdes), il a investi une grande partie des fonds de son diocèse, dans des spéculations qui ont rapidement tourné à la catastrophe à la suite de la crise des places financières en 2002 et 2003. Aujourd’hui, il se trouve – gros Juan comme devant - face à un trou d’environ 10 millions d’euro. Qu’à cela ne tienne : « Aide toi et le ciel t’aidera ». Et puisque la main droite de l’évêque a dilapidé les fonds (publics au passage), il est juste que sa main gauche essaye de rattraper les dégâts.

Appliquant les découvertes de Karl Marx concernant le Capital, il a rapidement tiré la conclusion qu’il ne pouvait se rattraper qu’en s’en prenant à la seule variable possible : les salaires des prêtres. Ceux-ci ont été réduits d’environ 30% depuis le 1er Janvier 2005. « Bonne année ! ... et surtout la santé, hein ! ».

La CSC, Centralo Syndicalo de los Calotinos [1] , ne l’a pas entendu de cette oreille. Une vingtaine de prêtres a dénoncé « la gestion peu transparente » de leur évêque. L’un d’eux, nous apprend le quotidien El Mundo, Alvaro Miralles, curé de Villafranca a expliqué que son salaire avait baissé de 40% : il ne touche plus que 295 euro par mois. Il a ajouté : « La Bourse est une institution qui sert à faire gagner de l’argent aux riches et où les pauvres en perdent. » ... C’est bien vrai. Comme le disait le Faust de Goethe : « Les fruits de l’arbre de la connaissance sont amers. »

« Hommes de peu de foi !, a répliqué l’évêque : Ne voyez-vous pas que Dieu, dans son infinie bonté, et dans sa grande prévoyance a permis la compensation de vos pertes ?. N’y a-t-il pas dans vos églises et chapelles des petites boîtes pourvues d’une ouverture et dont vous possédez les clés ?. Dans ces petites boîtes les membres du troupeau dont vous avez la charge, versent quotidiennement des oboles pour la guérison de leurs malades ou pour des actions de charité. Or, en vérité je vous le dis, charité bien ordonnée commence par soi-même. Compensez donc la baisse de vos revenus avec les recettes des troncs : Faites comme moi, allez chercher l’argent là où il est ! Amen » Jean-Pierre Mocky, dans Un drôle de paroissien n’avait pas prévu ce cas de figure. Comme quoi la réalité dépasse toujours la fiction.

C’est parce que l’Église sait s’adapter au monde moderne, et c’est une grande leçon d’amour pour le monde, comme disent les journaux.

Notes

[1] Cette organisation est une pure fiction et toute ressemblance avec la CFDT française serait de la pure mauvaise foi


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