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URBI et ORBI sont dans un bateau

jeudi 1er janvier 2009, par gerald cusin


« L’Eglise s’invite à bord de l’armada de Rouen » : c’est ainsi que titrait en juillet dernier le quotidien La Croix : grand messe, avec choristes, orchestre symphonique du CHU de Rouen, retransmission télévisée et tout le tremblement

Monsieur Descubes, qui fait évêque dans cette belle ville normande, a déclaré à cette occasion : « Je suis très content d’être là, j’ai été très sensible à l’invitation des organisateurs de l’Armada »… Mais cette invitation qui devait marquer à tout jamais les cœurs et les âmes des fidèles pour la plus grande gloire de notre Sainte-Mère l’Eglise, était un piège diabolique, et la sensibilité du prélat a causé un dérapage dans le bel ordonnancement : invité à monter sur le bateau de Patrick Herr, président de la manifestation, l’évêque est tombé dans la Seine. Ceci ayant eu lieu vers 23h30, on a craint un instant le pire pour cet homme d’un certain âge : on sait en effet que l’alcool et le bain ne font pas bon ménage.

Cela lui est arrivé alors que la fédération nationale de la Libre Pensée se réunissait à Roanne cet été. A la tribune, le président de notre association n’a pas manqué de nous informer – presqu’en temps réel – de l’état de santé du malheureux et a pris sur lui de rassurer tous les congressistes émus comme il se doit. Je dois à la vérité de dire que c’est tant mieux, et quasi miraculeux, que nous nous soyons trouvés à plusieurs centaines de kilomètres du lieu du drame : ayant un alibi en béton, il ne saurait être question de nous accuser de l’avoir poussé, ce que n’auraient pas manqué de le faire certains mauvais esprits comme il en existe hélas beaucoup parmi les bien-pensants. Pour une fois, la providence nous a été favorable, on ne saurait s’en plaindre. L’accident était fort bête au demeurant : en retournant sur le quai, Monsieur Descubes a marché sur le ponton tout en tournant la tête vers ses interlocuteurs. Confondant l’eau et les marches, la chute était inévitable. C’est le danger qui guette le pasteur, lorsqu’à la tête du troupeau des fidèles, il oublie de regarder l’horizon. Heureusement que les moutons qui le suivaient n’ont pas cru devoir en faire autant ! On aurait pu également imaginer que Dieulepère lui évite cette situation malgré tout gênante, voir légèrement humiliante, en le faisant marcher sur l’eau. Il y avait pourtant des précédents valant jurisprudence. Tout ce qu’on peut dire, c’est qu’il n’y a pas beaucoup de solidarité dans cette entreprise, et tout le monde n’est pas traité comme le fils du patron.

Monsieur Descubes a en fait été victime du modernisme, modernisme à juste titre condamné par le regretté Monseigneur Lefebvre : en effet, contrairement à ce dernier, il ne portait pas de soutane. Or, on sait que cette tenue – certes particulièrement ridicule, et qu’il est nécessaire de prendre entre ses dents lorsqu’on joue à chat avec les jeunes séminaristes – a cependant l’avantage de retenir l’air, et de se gonfler comme un airbag lors d’un contact – tant brusque qu’inopiné – avec un élément liquide : elle aurait ainsi servi de bouée, et à défaut de marcher sur l’eau, il aurait pu flotter avec grâce et élégance sous les yeux admiratifs de la foule qui était massée là.

Au lieu de cela, il a été péniblement hissé à bord, en recrachant quelques poissons – plus ou moins pollués évidemment – l’eau de la Seine n’ayant pas la pureté du lac de Tibériade il y a 2000 ans. « La morale de cette histoire », a-t-il cru nécessaire de commenter, « c’est qu’il faut toujours faire attention quand on marche au bord de l’eau »… Impressionnant !, seuls les grands hommes sont capables de tirer les justes enseignements de leurs erreurs, afin de rebondir et de progresser.

Quoique, encore une fois, si Jésus Christ avait tenu le même raisonnement, il n’aurait pas fait la carrière que l’on sait. A mon avis, Descubes, tu la joues petits bras, il faut savoir se mouiller parfois si on veut réussir.

Malgré tout, je serais marin et chrétien à bord de ces merveilleux voiliers, je ne serais pas particulièrement rassuré de voir que le bénisseur en chef local se soit ainsi misérablement pris le bouillon. C’est comme si votre garagiste vous rendait votre voiture révisée la tête pleine des bouts de verre du pare-brise, lequel aurait éclaté à la suite du lâchage des freins qu’il venait juste de contrôler … Vous vous diriez : y a du louche !

Apparemment, on dirait que je suis le seul à me poser ce genre de question : rien n’entame la foi du charbonnier, surtout lorsqu’il est marin.


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